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Le Swiss Income Monitor de la Banque Cler (BCSIM)

Parler d’argent, ça ne se fait pas. En Suisse, ce tabou touche plus particulièrement les salaires et les revenus. Peu de gens savent où se situent leurs revenus personnels en comparaison suisse. On sait donc peu de choses sur la répartition des revenus dans notre pays: quelles différences observe-t-on entre les cantons? Comment les revenus sont-ils répartis en Suisse, des plus faibles aux plus élevés, et quelle a été leur évolution?

Nous avons analysé la situation plus en détail et rassemblé pour vous toutes ces informations dans le Swiss Income Monitor de la Banque Cler (BCSIM). En collaboration avec l’institut suisse de recherches économiques BAK Economics, nous avons analysé la répartition des revenus en Suisse et dans les cantons. Nous nous sommes toujours basés sur le revenu net du ménage; en d’autres termes, dans le cas des ménages à deux revenus, c’est la somme totale de l’argent gagné qui est prise en compte. Les principales notions techniques sont expliquées dans un glossaire à la fin du document.

Dans l’édition actuelle, nous nous sommes penchés sur le développement pendant la période 2007–2020. Ainsi, nous pouvons désormais observer les effets de 2020, première année de la pandémie de Covid-19, sur les revenus et leur répartition en Suisse. Nous aurions souhaité tenir davantage compte des événements plus récents, à savoir l’impact de toutes les années de la pandémie, de la guerre en Ukraine ou de l’inflation sur l’évolution et la répartition des revenus en Suisse. Cependant, les effets ne peuvent être inclus dans l’analyse que lorsque les informations détaillées nécessaires sont disponibles – toujours quatre ans plus tard.

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1 Résumé

Évolution des revenus: entre 2007 et 2020, le revenu médian des ménages a augmenté de 9,8% au total en Suisse. Même au cours de l’année 2020, en temps de Covid, le revenu a progressé à l’échelle nationale par rapport à 2019.

En Suisse, les revenus ont sensiblement augmenté entre 2007 et 2020. Cela vaut tant pour le revenu moyen que pour le revenu médian. Le revenu net (médian) des ménages suisses s’établit à environ 53 900 CHF. Durant la période observée, celui-ci a progressé de 4 800 CHF (soit +9,8% au total, +0,7% par an). Le revenu net médian est le plus élevé dans le canton de Zoug (autour de 68 900 CHF, +14,5%), avantageux d’un point de vue fiscal. Ce canton est suivi au classement par ceux de Bâle-Campagne (60 100 CHF, +5,6%) et de Zurich (59 900 CHF, +12,2%). C’est au Tessin (44 550 CHF, +0,1%) et en Valais (44 950 CHF, +16,8%) que les revenus nets médians sont les plus faibles.

La crise du coronavirus n’a entraîné aucun recul des revenus en Suisse. Malgré l’effondrement de l’activité économique en 2020, les revenus ont augmenté en moyenne en Suisse sous l’effet des mesures de soutien adoptées par le Conseil fédéral et grâce à la résilience du marché du travail. Toutefois, cette crise n’a pas eu le même impact dans tous les cantons. Tandis que certains, notamment le Valais, ont vu leur revenu nettement augmenter, d’autres ont subi un recul, le canton de Schwyz ayant été le plus sévèrement touché.

Répartition des revenus: de grandes différences en comparaison cantonale. Le Valais remonte dans le classement

La comparaison cantonale révèle d’importantes différences: La tranche des 10% des ménages aux revenus les plus élevés oscille entre 107 800 CHF minimum de revenus nets dans le canton du Valais et jusqu’à 201 800 CHF minimum dans le canton de Zoug (Suisse: 131 400 CHF). Cette valeur dépasse ainsi la barre des 100 000 CHF dans toute la Suisse. La moitié de tous les ménages du canton de Zoug perçoit un revenu supérieur à 68 900 CHF, Zoug se situant là encore en tête du classement. Par contre, dans le canton du Valais, la moitié de tous les ménages gagne moins de 44 950 CHF, et moins de 44 550 CHF dans le canton du Tessin.

Toutefois, alors que le Valais était en position de lanterne rouge pour le revenu médian en 2019, le Tessin lui a succédé en 2020. Au cours de cette première année de la pandémie, le revenu net médian valaisan s’est inscrit en hausse, tandis qu’il a légèrement baissé au Tessin. Dans l’ensemble, les revenus médians ont quasiment stagné au Tessin entre 2007 et 2020 (+0,1%). À l’inverse, le canton du Valais a vu son revenu médian augmenter de 16,8%, soit la plus forte progression en comparaison cantonale après le canton d’Obwald, où le revenu médian a bondi de 18,6% sur la même période, de 45 700 CHF à 54 200 CHF.

2 Évolution des revenus

Ce chapitre étudie l’évolution du revenu des ménages dans le temps. Le revenu d’un ménage ne se compose pas uniquement de salaires, mais peut également être constitué de rentes, de revenus locatifs et d’autres produits de capitaux. De ces sources de revenus inégales peuvent découler de nombreuses définitions différentes du «revenu», qui sont reprises dans différentes statistiques. Pour effectuer une comparaison, il est donc essentiel de connaître la définition et d’utiliser une définition uniforme.

Dans le Swiss Income Monitor de la Banque Cler (BCSIM), on appelle «revenus» les revenus nets des statistiques fiscales. Le revenu net s’obtient lorsqu’on soustrait du revenu brut imposable (salaires, rentes, pensions alimentaires perçues, produits de capitaux et revenus locatifs) les dépenses fiscalement déductibles (cotisations sociales extraordinaires, pensions alimentaires versées, cotisations au 3e pilier et intérêts payés [intérêts hypothécaires, p. ex.]) et les déductions générales, telles que les frais de maladie et les dépenses dans le cadre de formations initiales et continues. Cette définition du revenu se prête particulièrement bien à une comparaison à l’échelle nationale, car des données uniformes et complètes en la matière sont disponibles pour tous les cantons, ce qui permet également d’analyser des changements spécifiques au fil du temps (p. ex. réformes fiscales). En outre, ce concept de revenu prend en compte toutes les sources de revenus et tient compte de la réalité des revenus «ordinaires» des ménages.

Hausse des revenus en Suisse

Combien un ménage suisse «gagne»-t-il véritablement en moyenne? En 2020, 71 000 CHF. Entre 2007 et 2020, le revenu net moyen a augmenté de 7 900 CHF, soit une progression totale de 12,5%, ce qui correspond en moyenne à une hausse du revenu de 600 CHF par an. Si l’on regarde les différentes années, la crise financière n’a entraîné un ralentissement de la dynamique de croissance qu’en 2009 et 2010. Le revenu moyen suisse a augmenté tous les ans, sauf en 2012 et 2015. Les revenus moyens ont également progressé entre 2019 et 2020, de près de 1%. Ainsi, la pandémie de Covid-19 n’a pas induit un recul des revenus en Suisse.

Revenu des ménages en CHF, taux de croissance en %
Source: AFC, BAK Economics

Le revenu moyen est toutefois souvent faussé par un petit nombre de très gros revenus influant fortement sur ce chiffre (on dit que la répartition présente une asymétrie à distribution négative. Si l’on veut savoir combien gagne un «citoyen lambda», mieux vaut s’intéresser au «revenu médian». En 2020, le revenu médian d’un ménage tournait autour des 53 900 CHF. Entre 2007 et 2020, ce chiffre a augmenté de 4 800 CHF (+9,8%). Durant la période observée (2007-2020), le revenu médian n’a baissé aucune année, contrairement au revenu moyen. Les revenus des ménages «lambda» subissent des fluctuations moins importantes que les très gros revenus. Sur la plupart des années, le revenu médian augmente régulièrement de 0,2% à 0,8%. Seules les années 2008, 2016 et 2019 ont connu une croissance supérieure à la moyenne. En 2020, la croissance s’élevait à 0,6% sur un an, le ménage médian percevant quelque 300 CHF de plus qu’en 2019. La pandémie de coronavirus a certes entraîné un effondrement de l’activité économique, mais le recours au chômage partiel et la résilience du marché du travail ont permis d’éviter une stagnation ou une baisse du revenu médian en Suisse.

De manière générale, on peut constater que le revenu moyen (+0,9% par an) et le revenu médian (+0,7% par an) ont tous deux augmenté dans des proportions similaires en Suisse au cours de la période considérée (2007-2020). Ils ont également progressé entre 2019 et 2020. Malgré l’effondrement de l’activité économique en 2020, les revenus ont augmenté en moyenne en Suisse sous l’effet des mesures de soutien adoptées par le Conseil fédéral et grâce à la résilience du marché du travail.

Évolution du revenu médian

Revenu net médian en CHF
Source: AFC, BAK Economics

Les revenus ont-ils également progressé en termes réels? Lorsque les prix augmentent plus fortement que les revenus, il se peut qu’en raison de l’inflation, les revenus aient certes progressé en termes nominaux, mais que le pouvoir d’achat, c’est-à-dire la quantité de biens et services qu’un ménage peut acquérir avec le revenu dont il dispose, ait quant à lui diminué. Entre 2007 et 2020, les revenus nets médians ont toujours (sauf en 2008) augmenté plus rapidement que les prix (mesurés par l’indice national des prix à la consommation 2005=100, https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/catalogues-banques-donnees.assetdetail.cc-d-05.02.08.html, données consultées le 29.4.2024), qui n’ont la plupart du temps augmenté que modérément et ont même reculé (déflation) certaines années, comme en 2020. Ainsi, le revenu net médian a augmenté de 8% (4 000 CHF) en termes réels sur la période observée pour s’établir à 53 100 CHF (prix de 2007). Entre 2019 et 2020, le revenu réel a progressé de 1,2%, soit 650 CHF, en tenant compte de la déflation.

Le canton de Zoug, avantageux d’un point de vue fiscal, affiche les revenus les plus élevés

Dans quels cantons les habitants bénéficient-ils des meilleurs revenus? Et dans quels cantons doivent-ils se contenter de moins? Si l’on examine les différents cantons, les cantons de Zoug, de Schwyz et de Nidwald, avantageux d’un point de vue fiscal, sont en tête du classement des revenus moyens. Avec près de 115 300 CHF, le canton de Zoug affiche le revenu moyen cantonal le plus élevé. Il devance ainsi la moyenne suisse d’environ 44 300 CHF. Dans le canton de Schwyz, les ménages gagnent en moyenne environ 96 200 CHF. Après Zoug et Schwyz, on trouve les cantons de Nidwald (85 400 CHF), de Zurich (80 300 CHF), d’Obwald (78 000 CHF) et de Genève (76 800 CHF), Zurich et Genève ne comptant pas parmi les cantons les plus avantageux d’un point de vue fiscal. La charge fiscale ne constitue donc pas le seul facteur qui explique les différences. Dans ces cantons, les revenus élevés s’expliquent aussi par la structure sectorielle, comme à Zurich, où le secteur financier très important tire les revenus vers le haut avec des salaires élevés et de gros bonus. Par ailleurs, de nombreuses sociétés de conseil et d’audit se sont établies dans le canton de Zurich. Les revenus sont également plus élevés que la moyenne dans cette branche. Genève dispose également d’un important secteur financier et présente un commerce des matières premières développé, où les revenus sont élevés.

Au bas du classement figurent les cantons du Jura et du Valais, avec un revenu moyen de respectivement 54 700 CHF et 54 100 CHF. Dans ces cantons aussi, le niveau faible des revenus s’explique entre autres par la structure sectorielle. Dans ces deux cantons, les branches à hauts salaires sont sous-représentées et les secteurs économiques offrant des revenus plutôt faibles sont en revanche relativement développés. Ainsi, dans le canton du Valais par exemple, 9% des salariés travaillent dans l’hôtellerie et la restauration, alors que la moyenne suisse est d’à peine 4%. Dans le canton du Jura, les salariés travaillent en grande partie dans des branches à plus faible revenu. L’industrie manufacturière y emploie 32% des salariés, mais cela inclut également l’industrie pharmaceutique et l’industrie horlogère, qui affichent toutes deux un niveau de productivité élevé et, de manière générale, un bon niveau de salaire. À l’échelle de la Suisse, seuls 15% de tous les salariés travaillent dans ce secteur.

Le canton d’Obwald réalise la plus forte progression durant la période observée, suivi de Bâle-Ville

Dans deux cantons, le revenu moyen entre 2007 et 2020 a enregistré une hausse de plus de 20% (Suisse: +12,5%): l’augmentation est de 34% dans le canton d’Obwald et de près de 23% dans celui de Bâle-Ville. En revanche, le revenu moyen a baissé à Genève (-1,3%).

Pour éliminer la distorsion induite par un petit nombre de très gros revenus (qui pourraient influencer fortement la moyenne en particulier dans les petits cantons), l’étude se penche aussi sur le revenu médian. Le revenu médian est également le plus élevé dans le canton de Zoug, avantageux d’un point de vue fiscal, et s’y élève à 68 900 CHF. Le canton de Zoug est suivi au classement par les cantons de Bâle-Campagne (60 100 CHF) et de Zurich (59 900 CHF). Les revenus nets médians sont les plus faibles au Tessin (44 550 CHF) et dans le Valais (44 950 CHF). Dans le canton du Tessin, les liens étroits avec la grande zone économique milanaise expliquent en partie le faible niveau des revenus. La proximité de la zone euro accroît nettement la pression sur les prix et, partant, sur les revenus, par rapport à la moyenne suisse. Plus de 25% des salariés dans le canton du Tessin sont des frontaliers, qui ont des prétentions salariales nettement inférieures à celles des travailleurs suisses.

Dans sept cantons, le revenu médian a enregistré une hausse supérieure ou égale à 14% durant la période observée: l’augmentation est de près de 19% dans le canton d’Obwald, de quasiment 17% dans ceux du Valais et d’Uri, de 15% dans le canton de Zoug et de 14% dans ceux de Berne et de Thurgovie (Suisse: +9,8%). Le canton d’Obwald a signé la plus forte progression, tant au niveau du revenu moyen que du revenu médian. Ce n’est qu’à Genève que le revenu médian – tout comme le revenu moyen – a diminué durant la période sous revue (-1,2% et -4,4%).

L’impact de la pandémie de Covid-19 sur l’évolution des revenus diffère en fonction des cantons: progression la plus forte en Valais, reculs les plus marqués dans le canton de Schwyz

Entre 2019 et 2020, les revenus moyens ont légèrement augmenté en Suisse. Il existe toutefois d’importantes disparités entre les cantons: les revenus moyens ont progressé dans le canton du Valais, passant de 51 400 CHF à 54 100 CHF (5,3%), ainsi que dans celui de Berne (1,1%), ceux des Grisons et de Bâle-Ville (respectivement 0,6%) et dans celui de Schaffhouse (0,2%). Dans les autres cantons, le revenu moyen a reculé, ceux de Schwyz et de Nidwald accusant les plus fortes baisses (respectivement -6,0% et -5,2%).

Le revenu médian, moins influencé par les valeurs extrêmes, a en moyenne également augmenté en Suisse entre 2019 et 2020, quoique plus faiblement que le revenu moyen (+0,9% contre +0,6%). Le revenu médian s’est inscrit en hausse dans la plupart des cantons. L’augmentation par rapport à 2019 dans les cantons du Valais (+6,0%), de Berne (+1,6%), de Bâle-Ville (+1,5%) et d’Obwald (+1,1%) a franchi la barre des 1% malgré les turbulences sur le front économique en 2020. Le revenu médian a stagné dans les cantons d’Appenzell Rhodes-Extérieures, du Jura, de Thurgovie, d’Uri et de Vaud. Sur la même période, il a par contre cédé du terrain dans les cantons de Schwyz (-1,7%), de Glaris (-0,9%), de Genève et Neuchâtel (respectivement -0,4%) et du Tessin (-0,1%).

Évolution des revenus – conclusion

En Suisse, les revenus ont sensiblement augmenté entre 2007 et 2020. Cela vaut tant pour le revenu moyen que pour le revenu médian. Parmi les cantons suisses, c’est le canton de Zoug qui affiche le revenu moyen et médian le plus élevé. À l’autre bout du classement, on trouve le Valais, où le revenu moyen est le plus faible, ainsi que le Tessin, qui affiche le revenu médian le plus bas. Le canton d’Obwald a signé la plus forte progression, tant au niveau du revenu moyen que du revenu médian. Seul le canton de Genève a vu ses revenus chuter au cours de la période observée. Il convient de noter que cela ne signifie pas nécessairement que les revenus des ménages individuels ont baissé en moyenne: il peut aussi s’agir de l’effet d’un déplacement des structures des ménages, par exemple, si les ménages à hauts revenus ont davantage quitté le canton de Genève.

La crise du coronavirus n’a entraîné aucun recul des revenus en Suisse. Toutefois, cette crise n’a pas eu le même impact dans tous les cantons. Tandis que certains, notamment le Valais, ont vu leur revenu nettement augmenter, d’autres ont subi un recul, le canton de Schwyz ayant été le plus sévèrement touché.

3 Répartition des revenus

Comment les revenus nets se répartissent-ils en Suisse? Ce graphique, appelé «Pen’s parade», indique tous les revenus des ménages suisses en 2020 en percentiles, des valeurs qui divisent une série de données par ordre de grandeur en cent éléments. La répartition des revenus recouvre tout le spectre des revenus d’une population (du plus faible au plus élevé).

Répartition des revenus en Suisse

10% des ménages gagnent plus de 131 400 CHF et 50% des ménages, moins de 53 900 CHF

Le graphique est interprété comme suit: Le 10e percentile (représenté par la 10e colonne à partir de la gauche) indique par exemple le niveau de revenu qui n’est pas dépassé par 10% des ménages. Le 50e percentile correspond au revenu médian.

En Suisse, la tranche de 10% des ménages au plus bas de l’échelle des revenus ne dépasse pas un revenu de 6 300 CHF. Cette tranche rassemble principalement des élèves, apprentis et étudiants majeurs encore soutenus financièrement par leurs parents. De 2019 à 2020, cette valeur a augmenté de 400 CHF. La tranche de 10% des ménages tout en haut de l’échelle dispose d’un revenu de plus de 131 400 CHF en 2020, soit 300 CHF de plus qu’en 2019. Comme le montre déjà le revenu médian, la moitié des ménages en Suisse a un revenu net supérieur à 53 900 CHF, et l’autre moitié perçoit moins de 53 900 CHF. Comme évoqué précédemment, le revenu médian n’a pas baissé, en Suisse entre 2019 et 2020, mais a augmenté de 300 CHF. Malgré la crise, la répartition des revenus nets des ménages a conservé dans l’ensemble un niveau très stable. En 2020, tous les percentiles ont fait état d’une hausse des revenus par rapport à 2019, à l’exception de la tranche des 3% des ménages au plus haut de l’échelle, où les revenus ont reculé.

Tous cantons confondus, la tranche supérieure de 10% des ménages gagne plus de 100 000 CHF

Comment se présente la répartition des revenus dans les cantons? La tranche des 10% des ménages aux revenus les plus élevés oscille entre 107 800 CHF minimum de revenus nets dans le canton du Valais et jusqu’à 201 800 CHF minimum dans le canton de Zoug (Suisse: 131 400 CHF). Cette valeur dépassait ainsi la barre des 100 000 CHF dans toute la Suisse.

Le revenu net médian est le plus élevé dans le canton de Zoug (autour de 68 900 CHF, +14,5%), avantageux d’un point de vue fiscal. Ce canton est suivi au classement par ceux de Bâle-Campagne (60 100 CHF, +5,6%) et de Zurich (59 900 CHF, +12,2%). C’est au Tessin (44 550 CHF, +0,1%) et en Valais (44 950 CHF, +16,8%) que les revenus nets médians sont les plus faibles. En 2019 et 2020, les cantons présentant les revenus médians les plus élevés étaient ceux de Zoug, de Bâle-Campagne et de Zurich. À l’autre extrémité du spectre figurent les cantons du Valais et du Tessin, où les revenus nets médians sont les plus faibles. Toutefois, alors que le Valais était en position de lanterne rouge en 2019, le Tessin lui a succédé en 2020. Au cours de cette première année de la pandémie, le revenu net médian valaisan s’est inscrit en hausse, tandis qu’il a légèrement baissé au Tessin. Entre 2007 et 2020, le revenu médian a plus ou moins stagné au Tessin (+0,1%), alors qu’il a augmenté de 16,8% dans le Valais, soit la plus forte progression en comparaison cantonale après le canton d’Obwald, où le revenu médian a bondi de 18,6% sur la même période, de 45 700 CHF à 54 200 CHF.

Revenu des ménages en CHF, taux de croissance en %
Source: AFC, BAK Economics


10% des ménages gagnent plus d’un tiers du revenu global

Si, en matière de répartition des revenus, on ne considère pas les limites de revenu, mais les parts dans le revenu global, en Suisse, les ménages de la tranche inférieure de 10% gagnent environ 0,4% du revenu global. 50% des ménages représentent 17% du revenu global, tandis que 90% des ménages s’arrogent 59% du revenu. Inversement, cela signifie que largement plus d’un tiers (41%) du revenu global est généré par les ménages de la tranche supérieure de 10%.

La part oscille entre 30% dans le canton d’Uri et 59% dans le canton de Schwyz

Sous l’angle cantonal, les parts des différents groupes de ménages dans le revenu total varient considérablement. Dans le canton d’Uri, la moitié des ménages génère 23% du revenu global, davantage que dans tous les autres cantons. C’est une nouvelle fois à Genève que cette part est la plus faible, avec à peine 10%.

90% des ménages perçoivent la part la plus élevée du revenu global (environ 70%) dans le canton d’Uri; à l’autre bout de l’échelle, on trouve le canton de Schwyz (41%). A contrario, cela signifie que, dans le canton d’Uri, la tranche supérieure de 10% des ménages génère 30% du revenu global, contre un peu plus de 59% dans le canton de Schwyz.

Répartition des revenus – conclusion

La moitié de tous les ménages en Suisse ne génère que 17% du total des revenus. La tranche supérieure de 10% produit 41% du revenu global. En comparaison cantonale, la moitié des ménages du canton d’Uri génère 23% du revenu global, davantage que dans tous les autres cantons. Dans le canton d’Uri, les ménages de la tranche supérieure de 10% captent la plus faible part du revenu global (30%), le chiffre le plus élevé, soit 59%, étant relevé dans le canton de Schwyz.

4 Complément: fortune

Toujours plus de millionnaires

Entre 2007 et 2020, le nombre de millionnaires a bondi de 72% pour dépasser les 374 000 ménages, soit 9,7% des ménages suisses au total. Cette hausse ne s’explique ni par le renchérissement (pratiquement nul) ni par la migration. Tandis que le krach boursier lors de la crise financière en 2008 apparaît dans les chiffres, les turbulences économiques dans le sillage de la crise du coronavirus n’ont eu aucun impact. Entre 2019 et 2020, temps de pandémie, plus de 20 000 personnes sont venues gonfler les rangs des millionnaires. Alors que la pandémie de Covid-19 a temporairement ébranlé les marchés financiers mondiaux au cours du premier trimestre 2020, les actions ont renoué avec leur tendance haussière au second semestre et inscrit en partie des records fin 2020. Les prix de l’immobilier ont également connu de fortes hausses. En particulier les fortunes en actions et les propriétaires immobiliers ont pu bénéficier de l’envolée des prix.

Avec 14,8%, le canton de Zoug enregistre la part de millionnaires la plus élevée par rapport au nombre de contribuables, suivi des cantons de Schwyz (13,7%), d’Appenzell Rhodes-Intérieures (12,3%), de Nidwald (11%) et de Zurich (9,7%).

Millionnaires

Nombre de personnes
Source: Administration fédérale des contributions, statistique de la fortune des personnes physiques, par can-tons et pour l’ensemble de la Suisse

La fortune des millionnaires a augmenté de plus de 90% depuis 2007. En 2020, elle s’élève au total à quelque 1 600 milliards de CHF. La fortune a plus fortement augmenté que le nombre de millionnaires, ce qui signifie que la fortune moyenne par millionnaire s’est aussi accrue (+12,2%). Cette hausse, du même ordre que la progression des revenus à la même période, apparaît faible, mais elle pourrait s’expliquer par le fait que la fortune également en nette hausse et relativement élevée des «anciens millionnaires» a été diluée (entendez «réduite») par la fortune relativement faible des «nouveaux millionnaires». Sur le front de l’évolution de la fortune des millionnaires également, le krach boursier lors de la crise financière en 2008 apparaît dans les chiffres. A contrario, la crise liée au coronavirus n’a pas fait baisser leur fortune.

Fortune des millionnaires

En millions de CHF
Source: Administration fédérale des contributions, statistique de la fortune des personnes physiques, par can-tons et pour l’ensemble de la Suisse

Globalement, le volume de la fortune de tous les ménages privés a aussi fortement augmenté. La fortune immobilière en particulier s’est accrue de 78%, à 2 225 milliards de CHF (soit 575 000 CHF par ménage), durant la période observée. Au total, la fortune privée des Suisses a augmenté de 60%, à 5 061 milliards de CHF, au cours de la période observée (env. 1,31 million de CHF par ménage). L’effondrement engendré par la crise financière de 2008 apparaît clairement au niveau des créances financières (qui rassemblent les avoirs bancaires et les obligations, mais aussi les actions, les fonds communs de placement et les prétentions envers des assurances et des caisses de pension) et par conséquent aussi au niveau de la fortune totale. Ces valeurs patrimoniales s’entendent brutes. Si l’on déduit les engagements financiers de 935 milliards de CHF, la fortune nette des ménages privés était de 4 125 milliards de CHF en 2020.

La fortune des ménages privés a continué sa progression en 2020, première année de la pandémie. L’augmentation de la fortune totale s’est inscrite dans la moyenne des années 2007 à 2020 (+3,9%); les créances ont quant à elles augmenté de 3,2% et la fortune immobilière de 4,4%. De même, la fortune nette des ménages privés a progressé de 4% entre 2019 et 2020. Les turbulences économiques qui ont marqué 2020, la première année de pandémie, n’ont pas entamé la fortune des ménages privés en réaction à la crise. Sur l’ensemble de la période observée, seule l’année 2008, marquée par la crise financière, a entraîné une réduction de la fortune totale.

Fortune des ménages privés

En millions de CHF
Source: Banque nationale suisse, fortune des ménages privés

Répartition de la fortune – conclusion

En résumé, on peut dire qu’au total, en raison de la forte hausse des valeurs immobilières et boursières durant la période 2007 à 2020, les fortunes ont augmenté bien plus fortement en Suisse que les revenus ou le PIB. Le nombre de millionnaires et leur fortune ont dès lors également très nettement progressé. La crise du coronavirus a certes induit un recul à court terme du PIB (-2,8%), mais n’a pas impacté l’évolution de la fortune. Les Suisses ont pu continuer à constituer leur fortune à la faveur de la hausse des valeurs immobilières et boursières, et n’ont pas été contraints d’y puiser grâce aux mesures de soutien adoptées par le Conseil fédéral.



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